Réforme de la formation des enseignant·es : Point d’étape au 16/05/2025

Les négociations sur la réforme de la formation des enseignant·es ont repris le 16 mai à l’occasion de la présentation du nouveau master Métiers de l’Enseignement et de l’Éducation (M2E) en groupe de travail ministériel. À la suite de ce nouveau temps de consultation, le SNEP-FSU souhaite réaliser un point d’étape.

En premier lieu, nous rappelons ici que le dialogue social installé pour cette réforme est inconséquent. Ce 4ᵉ groupe de travail à la mi-mai présentait aux organisations et aux formateur·rices le nouveau master. Le contenu du master entraîne pourtant des répercussions sur les trajectoires de formation des non-lauréat·es au concours L3 2026 et donc sur les contenus de licence pour la rentrée 2026. Les équipes attendent de savoir ce que vont devenir leurs étudiant·es à un ou deux ans avant d’arrêter leurs contenus de formation. Au-delà du calendrier intenable, la ministre de l’Éducation nationale s’était engagée à tenir un Conseil Social d’Administration de manière à permettre aux organisations syndicales de mettre au vote des amendements. Il n’aura pas lieu, le ministère arguant qu’il n’en a légalement pas besoin.

À ce désaccord global sur le dialogue social s’ajoute une déconnexion de la réalité des Universités. La réforme prévoit la mise en place de licence « Professorat des écoles » par les Universités et la mise en place des masters M2E également par les Universités. Les Universités ont le choix, nous dit-on, mais quels choix ? Les situations d’austérité, de gel de postes, de misère de l’Université imposent des choix sans rapport avec les besoins de formations et leur répartition sur le territoire. La fameuse autonomie des Universités casse l’égalité territoriale d’accès à la formation d’enseignant·es sur le territoire. De leur côté, les personnels déjà exsangues, sans moyens dignes de ce nom, sans postes pérennes vont s’épuiser encore une fois. Leur cas ne sera évoqué par le ministère que par un dernier groupe de travail… En juin.

Le ministère a publié un décret en avril définissant les statuts des lauréat·es de concours ; élève fonctionnaire en M1 et fonctionnaire stagiaire en responsabilité à 50 % en M2. Ce décret pose plusieurs questions, notamment sur l’insuffisance manifeste pour le redoublement ou le licenciement d’un·e lauréat·e du concours après le M1. Plus encore, il met en place une période d’engagement à servir de 4 ans. Nous ne pensons pas que, dans une profession en difficulté d’attractivité, instaurer une obligation à rembourser une partie des revenus touchés pendant ses études soit une grande idée. Comment aller demander à un·e jeune enseignant·e démissionnaire en souffrance de rembourser quoi que ce soit ? Le texte du décret renvoie les modalités de calcul du remboursement à un arrêté ministériel sans indiquer clairement qu’il n’est pas possible de réclamer une somme pour les années de M2 en responsabilité ou les premières années de titulaires. Enfin, la ministre s’est engagée à ce que le lieu de formation en master soit dans la même académie que le lieu de formation en licence. Sans nous dire comment cela sera possible de mettre en place une adéquation entre berceaux de postes pour les M2 en responsabilité et lauréat·es académiques du concours. Les impacts sur les mutations restent inconnus. À la suite de nos interrogations, l’administration tient finalement à aborder la question des affectations dans un futur GT. Nous attendons.

Le ministère n’a pas obtenu de Bercy de moyens pérennes pour la réforme. Il est question d’une enveloppe de moyens pour 2025-2026 sans garantie de reconduite aux années suivantes. Autrement dit, il n’y aura pas de postes en plus pour une modification aussi structurelle de la formation dans le pays. Les Universités ont besoin de postes. Les heures en plus ne corrigent pas les copies.

Le ministère a affirmé en groupe de travail bénéficier d’une enveloppe correspondant à 60 h pour 10 groupes dans 70 Universités du pays. Cet argent est à destination des Universités qui décideront de son affectation pour le premier ou le second degré, pour telle ou telle matière. Vous imaginez bien qu’il n’y a pas là de quoi modifier les maquettes, adapter les parcours pour toutes les disciplines, créer des modules spécifiques et ce, sans savoir si les Universités disposeront de cet argent pour 2027.

Le projet du ministère prévoit la mise en place d’une licence « professorat des écoles (LPE) » qui est envisagée comme la voie de formation de la moitié des professeur·es des écoles à moyen terme. Le ministère table donc sur l’ouverture de 5 000 places par les Universités en licence LPE. À moyens constants ou à peu près, il s’agit pour les Universités de basculer des moyens d’autres formations vers celle-ci. 50 Universités seraient à ce jour intéressées. La question de la répartition des places sur le territoire pour Parcoursup 2026 reste à ce jour sans réponse. Plus encore, le ministère veut mettre en place des passe-droits pour les titulaires d’une licence LPE se présentant aux CRPE. Il s’agit de dispenser des écrits ces candidat·es. La rupture d’égalité ne semble pas heurter le ministère, ni le Conseil d’État a priori. Inutile de dire que les modalités de mise en place évoquées en groupe de travail n’ont pas convaincu les organisations syndicales. Mais surtout, le ministère ne veut pas limiter les flux d’étudiant·es entre académies. Un·e étudiant·e en LPE dans une académie pourra passer le concours d’une autre académie ; le tout pouvant amener des effectifs de candidat·es importants dans les académies attractives, faibles dans les autres et des ruptures d’égalité avec les candidat·es issu·es d’autres formations. Le SNEP-FSU revendique le fait que la pluralité des parcours de formation des PE est une richesse pour les équipes et met en avant la qualité des parcours mis en place dans les STAPS pour former les professeur·es des écoles. Nous tenons à ce modèle qui paraît bien attaqué par des passe-droits hasardeux.

Nous nous réjouissons en revanche du retour au second groupe d’épreuves du CRPE de l’épreuve d’EPS. Les QCM étaient une folie, le ministère nous a entendu. Nous continuons de réclamer une épreuve pratique au concours.

La période de transition à 2 concours L3 et M2 panique les équipes déjà lessivées par la charge de travail dans les STAPS et les INSPÉ. Lors du groupe de travail sur les transitions, le nombre de postes n’a jamais été évoqué par le ministère. Il détermine pourtant le travail et les choix des équipes et des candidat·es. La question de savoir si les concours L3 et M2 doivent être simultanés ou décalés anime le ministère. Si elle est importante, elle dépend avant tout de la répartition du nombre de postes. Nous réclamons depuis des années un plan pluriannuel de recrutement. Cette revendication est plus que jamais d’actualité. Pour le moment, les étudiant·es de M1 et M2 ne savent pas à quel concours se préparer et n’ont pas idée du nombre de postes. Le ministère poussera-t-il le mépris à demander aux candidat·es de s’inscrire en octobre à un des deux concours tout en publiant le nombre de postes en décembre comme il le fait ces dernières années ?

Les échanges des organisations syndicales avec l’administration du master Métiers de l’Enseignement et de l’Éducation ont permis d’obtenir certaines avancées sur l’ajout explicite dans le texte du tutorat mixte, sur le mémoire de master qui n’est plus un mémoire de stage, sur l’apport de la recherche dans la formation. Toutefois, les organisations syndicales sont unanimes pour affirmer qu’un mi-temps en responsabilité constitue une charge de travail trop lourde pour la formation et l’obtention d’un master. Le ministère ne semble pas prendre en compte les leçons du passé, continue d’invisibiliser le travail de préparation des étudiant·es et s’accroche à une vision fantasmée selon laquelle le temps d’enseignement est par nature formateur. Parallèlement, les maquettes font état d’un nombre d’heures de formation en master plus faible que le master MEEF ou le projet 2024.

Et les personnels dans tout cela ? Les questions « RH » sont renvoyées à un groupe de travail en juin. Les inquiétudes pour l’avenir des petits sites de formation restent entières.

La question des recalé·es aux concours L3 reste problématique. Le ministère indique que les Universités pourront choisir ou non d’inscrire en M2E des non-lauréat·es. Il incitera les Universités à le faire de manière explicite, mais redit son absence de prise sur la décision des Universités. Au regard des moyens faibles et incertains, comment garantir que les équipes pourront former au concours en M1 ? Dans des disciplines comme la nôtre, les effectifs en licence sont très importants et le nombre de postes au concours beaucoup trop faible. Ce qui fait que la situation d’échec au concours L3 va concerner énormément d’étudiant·es. Les équipes devront pourtant décider d’une capacité d’accueil pour leur parcours non-lauréats.

Les lauréat·es seront affecté·es de droit dans les parcours lauréats. Mais le pronostic est délicat. Comment estimer le nombre de lauréat·es et de non-lauréat·es ? Combien d’étudiant·es vont passer de M1 parcours non-lauréats à parcours M2 lauréats ? Le ministère mettra-t-il à disposition des berceaux dans l’académie de formation pour les étudiant·es lauréat·es après le M1 et déjà entré·es dans le M2E ? Au regard des besoins de formation énormes en L3, les équipes seront tentées ou contraintes face à l’incertitude de baisser le nombre de places.

Nous terminerons sur le contenu du CAPEPS L3. Il n’est pas acceptable de recruter des enseignant·es d’EPS sur une prestation physique tirée au sort pour des questions de culture physique et sportive et d’équité entre candidat·es. Autre point, les APSA supports de l’oral et des prestations physiques diffèrent, ce qui va poser des questions de choix de formation aux équipes en STAPS en urgence. Enfin, le PSC1 et le TASA seront réclamés à quel moment ? Le ministère n’a pas statué, mais là encore, comment former plus vite plus d’étudiant·es avec si peu de moyens ?

Nous mettons ensuite sur la table la question des jurys pour les années de transition. Les écrits de concours vont se positionner dans le calendrier universitaire de fin de deuxième semestre. L’organisation pratique entre écrits et examens sera compliquée pour les étudiant·es et les formateur·rices. Mais plus encore, qui va corriger les copies aux 2 concours ? Les participations aux jurys pour les écrits sont aujourd’hui très chronophages, contraintes et stressantes, non pensées en articulation au travail quotidien des enseignant·es et des formateur·rices, et extrêmement mal payées. Comment, dans ces conditions, penser les deux jurys de concours pour l’an prochain ?

Le SNEP-FSU continuera de revendiquer que les non-lauréat·es au concours puissent bénéficier d’un parcours en M2E pour se repréparer au concours. Nous continuerons de porter la nécessité d’un volume de formation disciplinaire suffisant, d’un statut protecteur pour des enseignant·es en formation et d’un nombre de postes suffisant pour une EPS de qualité.

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