CDN des 20 et 21 mars 2025 – Introduction

Difficile de reprendre le cours de nos débats même s’ils ont pu se prolonger lors des congrès de la FSU depuis janvier et face à une actualité débordante. Ce congrès FSU riche en débats pose nombre de mandats et de perspectives dont il faudra nous nourrir pour développer l’activité revendicative sur de nombreux sujets. Lire et relire les textes qui en sont issus pour nous positionner sur les différentes actions est incontournable.

Ce qui domine bien évidemment et qui fait quotidiennement la une de tous les média, ce sont les conflits internationaux et surtout la guerre en Ukraine et le conflit israélo-palestinien. Si on a pu penser que beaucoup avait été dit et analysé sur le sujet, l’arrivée de Trump au pouvoir avec une équipe de fou furieux dopé à la Kétamine a rebattu les cartes. La proximité des Etats unis avec Israël n’est pas nouvelle. Israël bénéficie d’un lobby extrêmement puissant et historiquement implanté aux états unis, lobby qui est par ailleurs institutionalisé et qui influence très fortement les priorités législatives et la politique américaine avec des accords bilatéraux tant économiques que militaires. Mais là où Trump franchit un cap c’est dans son annonce de vouloir déplacer la population de Gaza pour prendre le contrôle de la bande de Gaza et en faire la « riviera du Moyen Orient », ce que l’ONU a qualifié de volonté de nettoyage ethnique. En lieu et place d’une recherche d’une paix durable, ces projets ne font qu’attiser les tensions dans l’ensemble de la région. Après des dizaines de milliers de morts, la trêve entrée en vigueur le 19 janvier est déjà rompue par une frappe israélienne dans la nuit du 17 mars faisant plusieurs centaines de morts.

Le second conflit sur lequel s’illustre particulièrement l’administration Trump est la guerre en Ukraine avec une forme d’alliance avec la Russie de Poutine, Trump allant même jusqu’à déclarer que l’Ukraine est responsable de la guerre et qualifiant Zelensky de dictateur se faisant en quelque sorte le porte-parole de Poutine. Cette « alliance » tournant le dos à l’histoire vient du fait que, pour Trump, l’ennemie n’est pas la Russie mais la Chine. Sans aller plus loin parce que chacun•e aura pu suivre l’ensemble de ces actualités répétées à l’envi par les médias, ce qui se joue derrière ces guerres sont d’une autre nature, des guerres économiques, technologiques, stratégiques. Les accords de cessez le feu négocié entre les états unis et l’Ukraine non ratifiés voire rejetés par la Russie pour l’heure en sont la preuve avec une volonté de mettre la main sur les minerais, le gaz, le pétrole ukrainien… Ces problématiques stratégiques et économiques sont au cœur de la folie trumpienne quand il annonce vouloir faire du Canada le 51ème état des états unis et mettre la main sur les ressources minérales du Groenland…

Les idées d’extrême droite gangrènent le gouvernement Trump, souvenons-nous que Steve Banon avait été son conseillé lors de son premier mandat. Ces idées gagnent de plus en plus de terrain à tel point qu’une internationale de l’extrême droite s’est formée et règne désormais dans de nombreux pays. Et même si Bardella a tenté de donner des gages de respectabilité en annulant son discours lors de cette « Conférence d’action politique conservatrice » après un salut Nazi de Bannon ou salut romain comme ose le prétendre Musk, personne n’est dupe en France, du RN et des idées qu’il porte. Le combat contre l’extrême droite doit gagner de l’ampleur pour mettre au jour son vrai visage, raciste et antisocial, et empêcher son arrivée au pouvoir. C’est l’enjeux de la manifestation du 22 mars journée internationale contre le racisme et le fascisme qu’il nous faut réussir.

Les discours, les appels à la paix dans le monde, s’ils existent sont peu nombreux et ne donne pas lieu à de fortes mobilisations. L’ONU qui devrait jouer ce rôle est muselée par son mode d’organisation et de fonctionnement. Les droits de véto brandis par la Russie et les Etats unis empêchent toute expression et action. En France, alors que la diplomatie devrait jouer à plein pour travailler à des solutions de paix, diplomatie malheureusement mise à terre par Macron, les expressions de nos gouvernants ne font qu’ouvrir de nouveaux fronts, de nouvelles tensions comme en témoigne les discours de Retailleau qui multiplie les provocations et les sorties racistes vis-à-vis des Algériens.

Les conflits internationaux sont l’occasion et l’argument pour développer des politiques de casse sociale et d’une nouvelle phase de destruction des services publics dans une optique libérale exacerbée. On le voit très fortement aux Etats Unis avec Elon Musk, directeur de l’efficacité gouvernementale qui démantèle des agences dont la dernière visait l’aide au développement international, licencie à tour de bras dans les administrations et les services publics quand dans le même temps, le révisionniste Trump mène un combat contre la science licenciant des milliers de scientifiques, bloquant les financements à la recherche, aux universités, sortant une nouvelle fois des accords de Paris… Cette attaque contre la science a donné lieu à un mouvement international le 7 mars dernier « stand up for science » pour sauver la recherche et défendre les libertés académiques.

Je n’irai pas plus loin sur ces quelques éléments bien sommaires de géopolitique puisque nous avons prévu ce soir d’avoir un débat plus approfondi avec une intervention de Catherine Tricot qui, pour nous, annule son intervention sur France 24 pour être présente et qui nous permettra d’avoir une vision un peu plus claire sur ce qui se joue.

Ce qui se passe aux états unis fait écho à ce que nous avons pu vivre et que nous vivons en France même si c’est dans une moindre mesure : attaque sur les libertés académiques au nom d’une pseudo lutte contre le wokisme et l’islamo-gauchisme, volonté de suppression de l’ADEME, attaques contre l’OFB, etc. et dernièrement l’attaque du HCERES qui émet un nombre très élevé d’avis défavorable pour des formations (privant potentiellement 50000 étudiants de place en licence ou en master). A ce propos, une mobilisation a eu lieu le 18 mars…

Même dans le propos nous pouvons retrouver certaines similitudes. On s’est offusqué à juste titre des propos tenu dans le bureau ovale lors de l’entretien entre Trump et Zelensky et notamment sur le reproche de non-remerciement mais il faut se souvenir que Macron avait fait la même chose en Afrique en 2025 en parlant de l’engagement de la France contre le terrorisme où il avait dit : « On avait raison, je crois qu’on a oublié de nous dire Merci » … Mépris et morgue sont des marqueurs forts de nos personnalités politiques actuelles…

Macron, toujours lui, après son pari raté de la dissolution, profite du contexte anxiogène pour se replacer sur la scène internationale et tente de redorer son image quand dans le même temps son gouvernement poursuit la politique menée jusqu’alors. Il continue sur le champ lexical qu’il a adopté depuis son accession au pouvoir, des mots valorisant le combat (mot qu’il emploie souvent) du « nous sommes en guerre » lors du COVID dont nous commémorons la 5ème année du confinement à la « mobilisation générale », l’ »union nationale », les différents choc (de compétitivité, de simplification, de savoirs…), le « réarmement démographique », jusqu’à « nous sommes prêt à un conflit prolongé » lors de la conférence de Munich sur la sécurité en 2023 à aujourd’hui la déclaration de l’instauration d’une économie de guerre. Tout est fait pour instiller dans les têtes que nous serions dorénavant face à un seul choix : nous battre sur tous les fronts, économique, industriel, sécuritaire, armé ou, quelque part, périr en se retrouvant sous la coupe d’autres puissances. Dans cet esprit martial, il envisage maintenant une transformation du SNU pour en faire un réservoir de réservistes militaires pouvant venir en soutien de l’armée. Alors que ce SNU est maintenant accolé à l’Educ, on peut se questionner au regard de la nouvelle discipline scolaire pour les lycéens et étudiants russes : l’éducation militaire et sportive sous l’appellation « prêt au travail et à la défense ».

L’économie de guerre dans laquelle on veut nous entraîner, c’est aussi et surtout de l’argent public. L’objectif pour soutenir cette économie est de trouver 50 milliards d’euros cette année / 68 milliards d’euros en 2030. La loi de programmation militaire 2024-2030 prévoit 413 milliards d’euros en cumul. Il faut ici rappeler que les exportations d’armes en France ont atteint 18 milliards d’euros l’an dernier, deux fois supérieur à 2023. La France est ainsi le 2ème exportateur d’armes au monde dernière les Etats Unis.

Quand on met en regard la promesse faite à l’union européenne de réaliser des économies à hauteur de 22 milliards jusqu’en 2029, les plans d’austérité visant à rembourser la dette contractée lors du COVID (i n’y a pas d’argent magique) alors qu’on a distribué de l’argent sans compter (le fameux quoi qu’il en coûte), on imagine très bien sur qui pèsera l’effort une fois de plus : une bonne partie des français (dont on envisage de solliciter les économies), les services publics et les agents (gel du point d’indice, suppression de la GIPA).

La dernière déclaration de Bayrou en fait une démonstration brutale en annonçant que compte tenu du contexte il était hors de question de revenir sur l’âge légal de départ à la retraite battant en brèche ses propres promesses faites au moment de l’installation du fameux conclave devenu délégation paritaire permanente, promesse également faite au PS pour éviter leur vote de la motion de censure.Ce que cadre l’intervention du premier ministre c’est la nécessité d’un rééquilibrage des comptes à échelle 2030… Reviennent par la grande porte la volonté de réfléchir un système intégrant une part de capitalisation et sur un changement de gouvernance. Sans mobilisation, le risque est grand de ne pas avoir d’avancées mais bel et bien de nouveaux reculs.

Ce Conclave retraite commencé le 27 février se réunit une fois par semaine jusqu’en juin… Le risque est de plus en plus grand de ne pas avoir de fumée blanche… Le patronat se positionne pour un statut quo, les syndicats souhaitaient revenir sur les 64 ans, le gouvernement s’y oppose et n’a pas abandonné l’idée d’une forme de régime universel avec capitalisation. 3 formats différents : réunion avec les 5, réunions avec en plus l’UNSA et la FNSEA et réunions avec les organisations représentatives de la Fonction publique… un beau bordel qui avalise une déconnexion des retraites du privés et de la fonction publique ! FO après avoir agi pour empêcher l’UNSA d’être présente dans l’objectif de cornériser la CFDT a quitté et mis en scène son départ du conclave. La CFDT porteuse de son projet d’une retraite par point fait tout pour bloquer tout processus de mobilisation ce qui aboutit à ce que l’IS FP ne puisse aboutir et que seules la CGT et la FSU pousse pour la construction d’un mouvement. Après de nombreux rebondissements, puisque nous serions dorénavant 4 ou 5 organisations dans les appelants : FSU, CGT, UNSA, Solidaire, CFE CGC ?). La question du 3 avril est envisagée comme une mobilisation starter à la veille du tunnel des vacances pour embrayer sur un mouvement plus large en mai avec l’interprofessionnelle. On sait très bien que ce ne sera pas un raz de marée compte tenu des délais pour préparer.

Après l’intervention de Bayrou, la CGT réagit à cette trahison en annonçant ne pas siéger à la réunion d’aujourd’hui, ce qui impacte la prochaine réunion de l’IS FP alors qu’il est plus que nécessaire de porter nos revendications sur les retraites et notamment sur la question des droits familiaux.

Sur l’Education, en se positionnant un peu en surplomb, on ne peut constater aucun changement d’orientation ni aucune mesure visant à améliorer le système éducatif et les conditions d’exercice des agents. Alors que nous sommes en pleine phase de recours sur les mutations, la carte scolaire montre de nombreuses fermetures de classes et de suppressions de postes dans certaines académies avec de multiples mobilisations locales. Le seul élément positif que nous avons salué est la parution du programme EVARS après moults hésitations, commentaires… C’est la seule fois où j’ai pu voir un CSE fonctionner démocratiquement avec des propositions d’amendements discutés et majoritairement repris dans le texte final. Un fonctionnement démocratique qui montre que cela est possible pour peu qu’on en ait la volonté. Le second élément positif c’est l’échec cuisant de l’appel à mobilisation d’associations réactionnaires le 10 mars contre ce programme.

Pour le reste tout continue au prétexte qu’il faut du temps aux dispositifs pour s’implanter et pour les évaluer… Même assoupli on reste sur la possibilité de créer des classes prépa seconde alors que le DNB ne sera finalement pas un prérequis à l’accès au lycée, on instaure deux heures de remédiation au lycée pour les élèves ne l’ayant pas acquis sans moyen puisqu’on continue à penser que les établissements ont des marges de manœuvre et que les barrettes et la destruction des groupes classe ne sont pas un problème, on reste sur les groupes de besoin, on continue l’expérimentation du port de l’uniforme qui coûte à l’Etat la bagatelle d’1,6 millions d’euros (l’autre moitié étant versée par les collectivités)… Finalement le tri social est toujours à l’œuvre habillé de discours sur la nécessité de venir en aide aux élèves en difficulté. Tri social qui se trouve encore renforcé par les attaques sur le pass’culture qui va priver nombre d’élèves d’une ouverture culturelle dont ils et elles auraient bien besoin. La Culture fait l’objet d’attaques et de restrictions budgétaires qui la mettent à mal. Le monde de la culture s’est mobilisé le 20 mars et il nous faudra être attentif aux suites qui y seront données.

Dans l’actualité éducative nous avons également l’affaire Betharram qui occupe le haut de l’affiche avec une défense éculée de Bayrou et de l’Education nationale : on n’était au courant de rien… Cela pousse quand même E. Borne à renforcer le contrôle des établissements privés hors contrat et indique que 10% des établissements seraient contrôlés chaque année… Il faudra donc 10 ans avant d’avoir fait le tour de cette question alors que les problématiques sont vives et urgentes pour les victimes éventuelles.

En EPS, ce sont les questions de programmes et de certifications qui sont au cœur des discussions du moment mais je ne développerai pas sachant que nous avons une séquence sur ces problématiques mais là aussi les enjeux sont d’importance pour l’avenir de notre profession.

S’agissant du sport scolaire, après l’éviction et le licenciement enfin obtenu d’O. Girault, preuve que les mobilisations construites sur la durée portent des fruits, un administrateur provisoire a été nommé en la personne de Guy Waïss. IGAENR honoraire, il a été à la DGESCO celui qui avait travaillé avec nous aux statuts que nous connaissons actuellement à l’UNSS et pilotait au nom de la ministre le CA et l’AG de l’UNSS. C’est donc quelqu’un qui connait très bien le milieu et qui devrait avoir comme mission de gérer l’UNSS tout en travaillant à des modifications statutaires. Le ministère souhaite en effet faire coïncider de nouveaux statuts (lesquels ?) avec l’appel pour le recrutement du futur ou de la future directeur/directrice… Nous aurons une première rencontre avec M. Waïss et le ministère la semaine prochaine.

J’aurais pu également parler du jeu de chaise musicale des recteurs. Nous sommes ici dans le même processus que celui post dissolution où sur les 41 ministres tombés le 4 décembre avec Barnier, 17 ont été reconduit pire dans les cabinets et services. On a assisté aux retours des Bayrou, Valls, Borne, Rebsamen, Vautrin, Dati et j’en passe… Tout comme la politique se rajeunit tant dans ses personnels que dans ses idées, le personnel de l’Education nationale reste inamovible et rien ne change vraiment…

Le contexte est pesant, anxiogène, plein d’incertitude mais je pense qu’il ne faut pas nous laisser submerger et envahir par lui. Le renfermement sur soi face à des difficultés professionnelles, face à un quotidien lourd avec des informations journalières qui en rajoutent est probablement pour beaucoup une question de survie mais n’est pas la solution. La très grande réussite du 8 mars dernier pour les droits des femmes doit nous encourager et nous permettre d’être confiant dans des possibilités de mobilisations quand les discours sont clairs et les manifestations engageantes. Nous avons toutes les raisons de batailler pour qu’un autre avenir se dessine, pour nos retraites, notre protection sociale globalement (on ne peut accepter d’être amputé de 10% de notre salaire quand nous sommes malades ; à ce sujet, la FSU travaille à un simulateur pour rendre visible les pertes salariales), pour nos conditions de travail, pour nos salaires, pour nos métiers… Il nous faut prendre le contre-pied des discours ambiant et donner à voir des perspectives possibles plus réjouissantes et motivantes pour donner l’envie de se mobiliser. Nos communications et leurs formes seront primordiales dans la période.

Plusieurs initiatives et mobilisations sont d’ores et déjà programmées dans lesquelles il faut que nous puissions nous inscrire :

Le 20 mars : journée d’action des retraités à laquelle il nous faudrait être présents le jour d’une expression du COR sur la question des droits familiaux qu’il nous faudra surveiller

Le 21 mars se tiendra une conférence de presse sur le lancement de la campagne contre le racisme sur les lieux de travail.

Le 22 mars : journée internationale contre le racisme et le fascisme

Le 25 mars : journée de grève et de manifestation contre le projet de loi Attal qui constitue une attaque majeure contre les droits et libertés de la jeunesse, notamment le principe d’atténuation des peines pour les mineurs, appliquée depuis 1791.

Le 1er avril grève à France Travail

La Campagne « printemps des services publics » se prépare. De nombreuses initiatives se construisent dans les territoires et la FSU est engagée sur certaines d’entre elles dont un événement le 11 avril au CESE.

Enfin, pour ce qui nous concerne très directement nous avons à continuer et à amplifier notre Campagne pour l’EPS lancée avec le gymnase score pour lequel nous aurons un moment de restitution et de débat.

Pour laisser place à notre débat, j’arrêterai là cette présentation aux débats en vous demandant comment vous analysez la situation actuelle, comment nos collègues se positionnent ? En parle-t-il ? sentez-vous des perspectives de mobilisations poindre ? Sur quelle problématique ?

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