3 QUESTIONS À… Benoit TESTE, Secrétaire général de la FSU

Par Benoit HUBERT

Benoit HUBERT : L’instabilité politique actuelle impacte l’ensemble de la société et génère confusion et mal-être. Un des rôles du syndicalisme n’est-il pas de donner des repères à l’ensemble de la population ? Dans ce contexte, comment se situe la FSU, quelles actions mène-t-elle ?

Benoit TESTE : La crise politique est grave et inquiétante dans ce qu’elle peut produire de dégoût pour la chose publique et au final d’approfondissement de la crise démocratique. Comme une impression que quel que soit le vote émis ou les luttes menées, nous sommes soumis à un éternel recommencement des politiques d’austérité.

Notre stratégie dans la période récente a consisté à faire en sorte que ce soient les intersyndicales qui, d’une certaine manière, incarnent la stabilité : les gouvernements passent, les urgences sociales demeurent. Cela s’est vu en particulier le 5 décembre où nous avons joué tout notre rôle pour réunir 7 des 8 syndicats autour des revendications salariales et d’opposition aux jours de carence, cela a permis le succès de la mobilisation et donc que le sujet de la fonction publique en général se réinvite sur le devant de la scène. De manière générale, l’activité et la revendication participent à nourrir, dans le débat public, la construction d’alternatives économiques et sociales.

B. H. : La Fonction publique est depuis de nombreuses années l’objet d’attaques très dures, encore plus vives depuis l’arrivée d’E. Macron au pouvoir. Comment la FSU analyse-t-elle cette volonté de destruction ? Vers quelles pistes de travail, d’organisation, de mobilisations se diriger pour remettre au cœur les services publics et la Fonction publique ?

B. T. : La Fonction publique est au croisement de deux détestations : celle des libéraux qui la voient comme un coût insupportable et celle de l’extrême droite qui identifie les fonctionnaires, à qui le statut garantit leur citoyenneté, leur carrière et leur indépendance, à des parasites. Le libéralisme rêve d’une fonction publique croupion, l’extrême droite d’une fonction publique d’allégeance.

Nous avons donc un travail colossal à mener qui est de l’ordre du combat de civilisation. Montrer et démontrer que la fonction publique est au cœur du pacte social, que l’indépendance des fonctionnaires garantie par le statut est un bienfait pour l’agent pour un exercice serein de son métier, mais aussi pour l’usager qui a ainsi le droit de s’adresser à un fonctionnaire intègre, compétent, indépendant, dans le cadre d’une société qui prend soin de l’autre, qui éduque, protège, accompagne, répare. Il faut mobiliser les personnels mais aussi toute la population.

B. H. : Comment se dessine l’avenir de la FSU et de ses SN dans ce combat essentiel ?

B. T. : L’avenir est conditionné à notre capacité à obtenir des avancées sociales au bénéfice de tous et toutes, et je suis persuadé que c’est possible. Quand nous créons les conditions de l’unité et du rassemblement, alors nous obtenons des victoires syndicales. Certes, celles-ci sont souvent partielles, voir en particulier la « dénaturation » à défaut d’abandon, des mesures « choc des savoirs ». Même sur la réforme repoussant l’âge de la retraite à 64 ans, nous n’avons certes pas gagné, mais le simple fait qu’elle reste deux ans après un caillou dans les chaussures macronistes est à mettre à l’actif de nos luttes et maintient l’espoir d’obtenir satisfaction sur la revendication d’abrogation.

Nous devons avoir conscience que c’est notre syndicalisme qui est précisément attaqué dans la période. Car d’une part il a à cœur d’être au plus près des réalités concrètes des métiers et constitue donc un insupportable « renvoi au réel » pour qui veut nier la nécessité de meilleures conditions de travail, d’emploi, de rémunération. Ensuite parce que le fait de se confronter aux réalités du quotidien des collègues ne nous empêche pas, bien au contraire, d’agir en faveur d’un changement « radical » de société. Là encore nous constituons un contre-pouvoir et sommes donc spécifiquement visés pour cela. Un syndicalisme de métier, de lutte, de transformation sociale et à vocation majoritaire : vaste mais nécessaire programme ! Pour le mettre en œuvre, il nous faut tout à la fois développer la FSU et mettre en place des cadres qui nous permettent d’approfondir le travail en commun avec les syndicats qui partagent ce projet, le travail que nous menons avec la CGT produit déjà des effets très positifs, mais n’est pas exclusif de ce que nous pouvons faire avec d’autres : je crois beaucoup en tous cas, que nous devons et avons les capacités de créer en toutes circonstances les conditions d’une unité entraînante et dynamisante pour inverser le cours des choses car nous avons la force du nombre. 

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