Parcoursup : la sélection dans l’inégalité !

En instaurant Parcoursup, la loi ORE a mis un terme au droit à l’entrée dans la filière de son choix à l’Université après la réussite au baccalauréat. Le législateur a préféré mettre fin à la conception qui prévalait d’une Université, espace de liberté, d’essai, de renouveau mais aussi d’échec, pour graver dans le marbre le principe de sélection. Tout cela plutôt qu’investir dans l’enseignement supérieur et accueillir dignement les générations des années 2000 et après.

Au-delà de cette opposition fondamentale à la sélection à l’université, nous avons cherché à connaître les inégalités d’accès et de réussite en STAPS consécutifs à ce choix de la sélection.

Les capacités d’accueil en STAPS

Les différentes STAPS ont des capacités très différentes pour la L1 STAPS. Nous mettons de côté les filières spécifiques kiné, LAS et autres qui sont sélectives. La L1 Staps est dite non sélective, sur le papier uniquement. Les graphiques attestent d’un nombre de places très hétérogène sur le territoire.

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L’accès en STAPS

Le ministère a publié les taux d’accès des différentes formations. Le taux d’accès est le ratio entre le rang du dernier appelé par la commission d’examens des voeux sur le nombre total de voeux qu’a reçu la formation. Les données sont disponibles pour l’ensemble des sites STAPS.

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Ce taux est très très variable en fonction des formations. Vous noterez la pression très forte pour les établissements de la nouvelle région Aquitaine. Papeete est premier, une ouverture récente pour 20 places. Viennent après Bordeaux, Limoges, Poitiers, Anglet. Suivies des métropoles ultra-dynamiques de l’arc atlantique et du Sud : Toulouse, Rennes, Nantes, Montpellier. Le taux d’accès est ici inférieur à 20 %. Cuffies et le Tampon ont des taux proches de 100 %.

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Parcoursup, au-delà de la fin d’une liberté d’accès à l’enseignement supérieur dans la filière de son choix, de la fin d’une possibilité d’émancipation, au-delà de l’outil de gestion du sous-investissement dans l’enseignement supérieur a instauré une sélection sur des bases totalement inégalitaires sur le plan géographique.

La réussite en L1 STAPS

Nous nous sommes intéressés ensuite à la réussite en L1. Le ministère publie ces données par Université alors que les données sur Parcoursup sont données par commission des voeux c’est-à-dire par site.

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20 % de réussite à Lille, moins de 30 % à Avignon, à la Réunion, à Nice. Alors que Chambéry, Liévin, Perpignan, Pau, Rennes ont des taux supérieurs à 70 %.

Là encore, le ministère a communique lors de la loi ORE sur sa volonté de faire réussir les étudiants par les dispositifs oui-si qui touchent une très faible minorité d’étudiants. Une posture d’affichage qu’il nous faut dénoncer car comme vous le voyez le taux de passage de L1 à L2 varie quasiment du simple au quadruple en fonction des sites. Une politique de suivi des sites serait bien plus profitable, d’accompagnement de moyens.

Politique de sélection/réussite des universités

L’idée étant de savoir si les effets de la sélection sont compensés par les effets de la réussite. Est-ce que les universités qui ont une réussite L1-> L2 importante sont celles qui ont une sélection très forte par Parcoursup ? Si le site sélectionne plus pour accéder à la L1 et qu’il compte donc de meilleurs étudiants, est-ce que la réussite L1-> L2 est plus forte ?

Cette comparaison n’est pas facile en raison de la différence de périmètre des données ministérielles. Le taux d’accès est donné par site, le taux de passage par université.

Ainsi pour une université ayant 2 sites, nous ne pouvons pas connaître le taux de passage de chacun des sites en le comparant au taux d’accès. Ce manque dans les données est dommageable puisque nous savons que les sites principaux ont des taux d’accès plus élevés que les sites secondaires, et il serait intéressant de comparer la réussite des étudiants dans des sites dépendant de la même université mais sélectionnés de manière différente à l’entrée.

Les données sont tout de même présentées sous forme de nuage de points plaçant chaque site sur deux axes : taux d’accès et taux de passage.

Dans le premier graphique, ne sont présentées que les universités n’ayant qu’un seul site.

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Dans le deuxième graphique sont présentés tous les sites avec le taux d’accès de leur université. Pour faciliter la lecture, nous avons représenté par la même couleur les sites d’une même université.

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Pour aller un peu plus loin sur ce graphique, nous remarquons

  • Que le travail des équipes et l’harmonisation des sélections par la C3D empêche une distribution catastrophique des sites entre des staps très sélectifs en amont et faisant peu passer en L2 leurs étudiants et des STAPS non sélectifs et faisant facilement passer leurs étudiants. Le cas de Lille, STAPS en grande souffrance selon les collègues, pose tout de même question.
  • Que la distribution globale renvoie à peu près, à une diagonale exprimant le fait que plus la sélection est importante pré-L1, plus la réussite en L1 est importante.
  • Qu’il existe un ensemble important de sites en partie basse de cette diagonale attestant d’une sélection plutôt forte et d’une réussite plutôt faible.
  • Qu’il existe, pour des taux d’accès identiques, des écarts de 30% du taux de réussite en L2 entre sites. Parfois 50 % !
  • Qu’en multipliant les taux d’accès en L1 et de passage en L2, nous montrons que 6 candidats Parcoursup sur 100 parviendront en L2 à Lille, 8 à Bordeaux, 10 à Poitiers contre 50 à Boulogne, 40 à Cuffies et à Bourges.

Notre travail mérite certaines confirmations statistiques et méthodologiques mais il interroge sur les inégalités territoriales d’accès et de réussite en L1 STAPS, et surtout sur la combinaison de ces deux paramètres.

Parcoursup a instauré une sélection à l’aveugle sur le territoire, sélection très hétérogène qui s’est durcie ces dernières années sans augmentation des capacités d’accueil depuis 2018. Parcoursup a été accompagné d’un plan de création de postes bien faible une fois les cohortes montées en régime dans les établissements. Le plan STAPS de l’an dernier n’a que très peu corrigé ce sous-encadrement historique de la filière. Cette absence d’encadrement rend impossible, dans de très nombreux établissements, la mise en place de réelle politique d’établissement digne de ce nom sur les attendus de L1 faute de temps, et encore moins une harmonisation nationale.

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