La crise autour de la prochaine coupe du monde au Qatar est dorénavant une réalité en France comme ailleurs. La décision d’attribuer la coupe du monde au Qatar par la FIFA en 2010 est entachée depuis le début de soupçons de corruption autour des votes des différentes fédérations nationales et internationales (estimée à 150 millions d’euros…) avec notamment des accords politiques et économiques troubles entre le Qatar et des gouvernements de nombreux pays. Son maintien entache de façon indélébile ce type d’événement sportif international en l’éloignant toujours un peu plus d’une de ses missions principales, celle d’être un moteur de développement du sport populaire.
Le SNEP-FSU dénonce et condamne les conditions dans lesquelles cet évènement est organisé :
– inhumanité des conditions faites aux travailleurs qui ont entraîné plus de 6 000 morts sur les chantiers : des migrants, non payés, sans droit, avec des passeports confisqués dont les conditions de vie sont insalubres et qui sont touchés par la misère et la dénutrition…
– gabegie écologique d’une coupe du monde dans des stades climatisés en plein désert avec des vols de 160 avions par jours pour que les supporters rejoignent leurs hébergements… Elle contribue à l’aggravation de la crise climatique et participe de la crise de confiance de la population vis à vis du « monde des nantis », qui peuvent tout se permettre alors que les crises énergétiques à venir imposeront des restrictions à chacun-e.
– non-respect des droits humains (droits des femmes, emplois, rémunérations, droits syndicaux, conditions de travail et de vie, respect des minorités sexuelles …) qui est dénoncé régulièrement, par nombre d’ONG (Amnesty, Human Rights Watch…) pour ces atteintes aux droits fondamentaux de la personne humaine.
– faillite politique et morale des instances du football et de la FIFA en particulier qui renient les valeurs morales et éthiques qu’ils prétendent défendre.
– faillite du sport ultra marchandisé, instrumentalisé par les structures représentatives telles que FIFA, CIO, UEFA, FFF, mais aussi par des instances économiques, politiques et diplomatiques allant à l’encontre du développement d’un sport humaniste et émancipateur porté par nombre de pratiquant·es et d’éducateurs/éducatrices au quotidien.
Pour rayonner, pour se parer d’honorabilité, et pour se construire une image respectable sur la scène internationale, le Qatar, mais aussi d’autres Émirats et États riches de l’argent du pétrole se sont emparés à coup de milliards de clubs, de stades et d’événements sportifs européens et mondiaux.
Dorénavant, les intérêts financiers, exacerbés dans le monde du football, mais de plus en plus prégnants dans de nombreux autres sports, priment aujourd’hui sur les enjeux sociaux, environnementaux, humains et sportifs. Cela au détriment des populations, des travailleurs et des travailleuses, et des sportifs eux-mêmes qui sont nombreux à s’exprimer individuellement ou collectivement pour contester cette Coupe du Monde allant jusqu’à proposer son boycott.
Le SNEP-FSU revendique des Événements Sportifs Internationaux (ESI) démocratiques, solidaires, écologiques et économiquement éthiques, tel que nous l’exprimions dans notre texte de 2014. L’implantation et l’organisation des ESI sont aussi, paradoxalement, l’occasion de mettre en lumière tous les problèmes de différentes natures des pays/villes organisateurs. La France n’en est pas exempte, notamment avec la préparation des JOP 2024 et la question des ouvriers détachés, voire clandestins, sur les chantiers, ou encore de la recherche de milliers de bénévoles qui permettront à certains de profiter un peu plus de « main d’œuvre » gratuite.
Pour toutes ces raisons, le SNEP-FSU soutient :
- les manifestations des équipes, des joueur·euses et supporter.trices qui condamnent les conditions de mise en place de cette Coupe du Monde.
- les nombreuses voix (personnalités, associations, ONG, presse, collectivités refusant de couvrir l’événement) qui dénoncent l’organisation au Qatar de cet événement.
Le SNEP-FSU appelle au développement de ces analyses et prises de positions qui permettent de contribuer à la prise de conscience pour imposer de nouvelles modalités de désignation avec un « cahier des charges » qui respecte les droits fondamentaux.
Une réorientation rapide des ESI doit s’opérer notamment en France avec l’organisation de la coupe du monde de rugby 2023 et des JOP 2024.
Les enseignant·es d’EPS et professeur-es de sport qui, au quotidien, enseignent et éduquent à des valeurs de partage, d’entraide, de solidarité, de respect, … autour du sport ne peuvent cautionner une organisation qui contrevient à leurs actions au bénéfice des élèves.
Le SNEP-FSU, syndicat des enseignant·es d’EPS et des professeur·es de sport, appelle à la tenue de larges débats (établissements scolaires, clubs, fédérations…) sur la Coupe du Monde au Qatar et au-delà sur tous les ESI.
Pour peser, le SNEP-FSU s’associera à toute démarche appelant à un boycott diplomatique. Il s’associera également à tout appel de personnalités à ne pas se rendre à la compétition et à contester ouvertement et fortement ces choix.
Ces procédures de désignation des ESI doivent être rapidement revues, rénovées et démocratisées pour prendre en compte l’ensemble des enjeux (politiques, économiques, sociaux et environnementaux) à court et long terme, portés par les acteur·trices du sport et les citoyen·nes qui devront prendre en main ces choix, actuellement soumis aux seuls enjeux financiers et géopolitiques.