Par Bruno Cremonesi
Vendredi 13 octobre, le SNEP-FSU a rencontré la DGESCO. La rencontre s’est articulée autour de la demande du début d’année, de faire remonter les notes de chaque Attendu de Fin de Lycée. Une occasion pour revenir sur les propositions que le SNEP-FSU porte pour le Bac en EPS.
La nouvelle commission Bac pourrait se saisir de cette opportunité pour proposer des modifications significatives, dont la répartition des points, en valorisant à 16points les attendus liés à l’évaluation de la pratique des APSA (AFL1 en lycée général). Le SNEP-FSU continuera dans l’ensemble des rencontres de défendre ces propositions dont celle d’un doublement du coefficient au Bac.
Les enseignant·es vont devoir, à nouveau, s’adapter à une nouvelle modalité pour le Bac. Après 3 années de mise en place du Bac, la DGESCO et l’inspection générale souhaitent différencier la remontée des AFL ou AFLP en termes de notation. Lors de cette rencontre, la DGESCO précise que ce choix est fait pour respecter les textes officiels et l’indication de 3 AFL en lycée général. Les enseignant·es d’EPS vont devoir faire remonter 3 notes pour les attendus de fin de lycée ou 4 pour le lycée professionnel. Cela fait donc une double saisie, une fois pour soi et une fois pour rentrer les notes sur le logiciel de 9 notes en lycée et 12 notes en lycée pro. Au-delà de l’augmentation du risque d’erreurs, cela représente un travail qui n’a pas de sens.
Cyclade et les 3 notes : vers une valorisation de l’AFL1
Le texte officiel ne fait d’ailleurs, à aucun moment, référence à la nécessité de remonter cette subdivision. En effet, il est précisé dans le BO pour les lycées général : « Pour chacune des trois épreuves, une note de 0 à 20 points est proposée par le jury certificatif. La note finale correspond à la moyenne des trois notes. Cette note est arrondie au point entier le plus proche après harmonisation par la commission académique. »
Les derniers rapports de la commission d’évaluation nationale aux examens en EPS ne font pas mention de cette absence de subdivision de la note comme un problème particulier et ne donne aucune recommandation sur ce point.
Les grandes perdantes en EPS sont les filles des lycées professionnels.
La seule raison est de se doter d’un outil d’analyse qui risque de valider un existant que nous ne cessons de dénoncer. Une EPS qui tend à reproduire les inégalités de genre et de classe : les Attendus de Fin de Lycée liés au méthodologique ou au savoir s’entrainer sont plus favorables aux élèves les plus scolaires et donc issu·es des milieux sociaux les plus favorisés. Le deuxième constat est que les filles restent moins en réussite. Les grandes perdantes en EPS sont les filles des lycées professionnels.
A demi-mot, c’est une façon de reconnaître que l’AFL1 n’est pas assez prise en compte et que l’augmentation des notes est une part trop importante des compétences liées à autre chose que « le moteur » pour reprendre la division proposée dans les textes. L’inspection générale nous a garantis que ces notes seraient mises à disposition des équipes pour réaliser des comparaisons.
Bac national vs tests nationaux
La nouvelle annonce du président de la République est la mise en place de tests nationaux. Une annonce pour le moins surprenante au moment où notre demande d’un bac et d’un DNB national est refusée.
Notre demande n’est pas d’avoir une uniformité niant les réalités locales et les adaptations aux conditions matérielles, mais d’avoir par APSA un référentiel qui précise les attendus des savoirs à atteindre à la fin du collège et du lycée. L’État n’est-il pas garant pour déterminer ce que tout élève doit maitriser à la fin de ces deux étapes de la scolarité ?
En cherchant à supprimer la référence aux APSA, l’institution a été obligée de produire des référentiels par champ. Des champs qui regroupent des APSA de nature très différente. Ils auraient pourtant pu même en conservant les champs, dans une logique programmatique, préciser par APSA ce qui était attendu. La version des programmes réalisée par le groupe d’expert avait fait cette proposition avant d’être balayée de façon douteuse par un jeu de conflits internes par l’institution.
Un Bac EPS : une vérification par « carottage aléatoire »
Aujourd’hui le Bac local qui devait conserver une régulation académique est en train de se dissoudre. Il n’est pas possible de vérifier sérieusement la validité de l’ensemble des référentiels d’établissement comme nous l’avions pressenti. Certain·es en proposent même deux différents pour une même APSA. La structure est en train de se fissurer et même les commissions d’harmonisation qui devaient garantir une certaine équité n’existent pas partout. Sur l’ensemble des académies, un peu plus d’une sur 5 n’a pas réalisé d’harmonisation et une sur 4 dans les lycées professionnels.
Pour pallier cette difficulté et ne pas vouloir reconnaître que cela n’est pas possible, des IPR
vont fonctionner par un « carottage aléatoire ».
La validation académique devait garantir aux candidat·es qu’ils·elles seraient évalué·es en respectant l’équité territoriale et la conformité aux attendus des examens. En réalisant un « carottage aléatoire », on déplace la fonction des IPR vers une vérification du travail enseignant et la conformité aux attendus, laissant planer le doute que, peut-être, certain·es n’auraient pas respecté le cadre. Notons, et ce n’est maintenant un secret pour personne, que dans les pratiques, les enseignant·es se sont largement affranchi·es du cadre commun pour procéder à des arrangements évaluatifs assez importants.
Les notes augmentent, pourtant le niveau baisse ?
Depuis la nouvelle évaluation, l’imposition de 8 points sur 20 sur d’autres éléments que la motricité a produit « artificiellement » une augmentation des notes. Alors même que l’ensemble des spécialistes semblent alerter sur la baisse des capacités de la jeunesse et que les professeur·es d’EPS constatent une baisse dans les performances des élèves, les notes augmentent. Nous analysons cette augmentation par une baisse de la place accordée à la motricité. Il est plutôt contradictoire de constater que les déclarations vont dans le sens d’une valorisation de l’activité sportive à l’école et dans la société, mais la dimension pratique de cette culture ne représente que 60 % de la note finale.
Il est urgent de remonter à 16 points la dimension pratique de l’EPS, la commission nationale des examens a cette prérogative et peut agir dans ce sens.
La CP5, le champ d’apprentissage pour avoir une bonne note au Bac
Le dernier rapport de la commission montre à ce sujet qu’à l’évidence pour avoir plus de 15 au Bac en EPS, il faut prendre une activité du groupe de la CA5. Parmi les 7 meilleures notes, 5 font partie du groupe de la CA5. Nos élèves ne sont pas meilleur·es en CA5 que dans les autres activités. Cela traduit, de notre point de vue, une notation qui prend moins en compte les apprentissages dans l’activité physique et accorde plus de place aux autres savoirs dont les attitudes et des savoirs plus théoriques. Des savoirs qui valorisent les élèves scolaires capables de justifier ou de dire à l’oral ce qui est attendu par l’enseignant·e.
Nous assistons à une dé-sportivisation de l’EPS et le risque d’en faire une discipline sanitaire et individualiste. Le trio gagnant du Bac n’intègre aucun sport collectif ou pratique artistique. Trois sports arrivent en tête : Badminton pour 16 %, musculation et demi-fond pour 14 %. Cette triplette gagnante représente plus de la moitié des APSA qui seront évaluées au bac. En lycée pro, il n’y a pas de grande variation dans la programmation des APSA. Le badminton représente la moitié du champ 4 et le demi-fond 60 % du champ 1. Cette recentration sur 3 APSA devrait nous questionner sur le devenir de
notre discipline et son appauvrissement de la diversité de la culture. Les passages obligés et la logique de programmation des textes comme la nécessité de visiter tous les champs en 3 ans pèsent fortement sur ces choix. Une logique qui fait comme si les élèves n’avaient pas fait d’EPS en collège. Le SNEP-FSU continue de porter, quant à lui, une évaluation au Bac centrée sur deux APSA correspondant à un choix des équipes et permettant un approfondissement. Diversité et approfondissement devraient pouvoir trouver un autre équilibre en lycée.
Une nouvelle commission Bac va donc être nommée. Un cycle s’achève et la nouvelle commission pourrait se saisir de cette opportunité pour proposer des modifications significatives. Le SNEP-FSU continuera dans l’ensemble de ces rencontres de porter ces propositions dont celle d’un doublement du coefficient au Bac. Une mesure symbolique pour les JOP 2024.