Par Pascal Anger
Rappelons le pourquoi on en est arrivé à ces annonces et ces choix d’économie (20 milliards (Mds) en 2024 (10 + 10) et pour 2025, Bruno Lemaire (BL) annonce 20 Mds) qui visent notamment la jeunesse en formation, la recherche et l’écologie, donc l’avenir.
- Ce budget 2024 a été adopté par le 49.3 sans vrais débats. La prévision de croissance (1,4 %) était, aux dires d’instances habilitées, surestimée (cf. Haut Conseil des finances publiques, Banque de France, …) et prévoyant plutôt autour de 1 %.
Ce PLF 2024 s’inscrit dans le projet de loi de programmation des finances publiques (PLPFP) de 2023-2027 visant au « redressement des finances ou des comptes publics ». Cette cible est le retour au ratio « arbitraire » pour revenir sous la barre de 3 % de déficit public par rapport au PIB, soit 2,7 % en 2027. Cela se traduirait par des baisses de dépenses publiques encore jamais vues (autour de 50 Mds [!] sur la période et donc poursuite en 2026 et 2027). - Le déficit supérieur à la cible de 4,9 % en 2023 et qui sera de 5,5 % (cf.1 note INSEE) est d’abord un déficit de recettes, lié à la moindre croissance (encore surestimé), un ralentissement de la dépense publique par rapport à 2022 et la poursuite, sanctuarisation de diminution de recettes publiques déjà engagées (moins 50 Mds par an éliminés par BL de 2017 à 2022 et poursuite en 2023 (Taxe Habitation, CVAE, …).
- Ensuite ce gouvernement reste dans le dogme, revalidé dernièrement par Bruxelles, de ramener le déficit public sous la barre des 3 % à échéance 2027 et donc d’atteindre 2,7 % en 2027. Il suffirait ici de ne pas se laisser enfermer par cette cible face au ralentissement de croissance.
- Mais surtout, il y aurait un tout autre choix, tout en restant dans leur logique de contenir le déficit public. Ce serait d’agir sur un autre levier qui est d’augmenter les recettes (les impôts) du côté surtout des grandes entreprises (record historique de près de 100 milliards (Mds) de dividendes du CAC 40 pour 2023 (+ 21 %)) et vers les plus riches.
T. Piketty a proposé de créer un taux de 2,5 % de CSG sur les 500 plus grandes fortunes de France (1 170 Mds ! classement annuel du magazine Challenges – juillet 2023) et qui rapporterait au moins 25 Mds par an, en augmentant d’autant donc les recettes de l’État. CQFD.
Une répartition déséquilibrée
Ce plan entraîne des choix dans la répartition des économies qui auraient dû, selon B. Le Maire, être proportionnelles au poids respectif de chaque budget ministériel dans le budget général de l’État.
Le MESRI contribue ainsi aux économies à hauteur de près de 9 % pour un poids de 3,3 % dans le budget de l’État (904 millions). La part des économies pour l’écologie est de 21 % du total, alors même qu’il ne pèse que 5 % des dépenses.
Parmi les autres postes mis à contribution de façon disproportionnée, on notera, entre autres, la culture qui devra participer à hauteur de près de 2 % du total, pour un poids dans les dépenses de l’État de 0,57 %, etc…
La défense, elle ne contribue que très peu par rapport à son poids. L’éducation voit son budget amputé de 692 millions – ce qui est conséquent aussi, même si c’est un peu moins que son poids dans le budget initial – alors que le système éducatif est en crise profonde en raison du manque de moyens. Les aides au développement, à l’emploi, le logement et les collectivités locales seront aussi très touchés.
On ne peut accepter ces plans d’économies pour 2024 et 2025 qui sont mortifères pour nos services publics (SP) et la protection sociale (PS). Près de 200 Mds d’aides aux entreprises2 dont les plus riches et sans contrepartie, plus les diminutions d’impôts en % pour les riches particuliers avec « jackpot » sur les dividendes, sont bien le signe de la préservation du capital et du hold-up permanent.
Refusons la désinformation, imposons un vrai débat démocratique sur la base d’arguments non fallacieux ou tronqués pour faire d’autres choix qui sont possibles et qui devraient être incontournables.
- https://lesite.snepfsu.fr/agir/outils-danalyse/politique-generale/note-analyse-de-linsee-sur-le-deficit-public-2023/ Lire dans cette note la charge de la dette 2023 et 2022 [↩]
- Page 3 et 4 : https://lesite.snepfsu.fr/agir/outils-danalyse/politique-generale/note-dinfos-arguments-deconomie-politique- snep-fsu-n7/ et https://lesite.snepfsu.fr/agir/outils-danalyse/economie/un-pognon-de-dingue-pour-les-entreprises-au- moins-160-milliards-mds-daides-publiques-par-an/ [↩]