Déclaration au CSE* devant Gabriel Attal

Le ministre de l’Éducation nationale n’ayant toujours pas pris le temps de recevoir le SNEP-FSU, l’occasion nous a été donnée de lui exprimer l’ineptie des politiques éducatives sur le plan de l’EPS, lors du Conseil Supérieur de l’Éducation du 12 octobre dernier. À l’aube des JOP de Paris, communiquer à tout va et à longueur d’ondes sur la nécessité d’augmenter la pratique des jeunes ne peut avoir d’effets miracles. D’autres initiatives que les 2h de sport, des moyens en conséquence sont indispensables et exigent une volonté politique forte, pour l’instant bien absente.

Déclaration de Benoit Hubert, co-secrétaire général du SNEP-FSU, au CSE du 12 octobre 2023

Monsieur le ministre, monsieur le Président, mesdames, messieurs les membres du CSE,

Depuis l’attribution des Jeux Olympiques et Paralympiques à la ville de Paris dont la candidature portait un axe important sur les questions d’héritage et après la pandémie de Covid qui a révélé aux yeux de tous et toutes l’état déplorable de santé physique des jeunes, ce qui a un impact direct sur les apprentissages, de plus en plus d’acteurs questionnent le rôle et la place des pratiques physiques et sportives dans le système scolaire.

Ce travail sur l’héritage a amené des expressions présidentielles visant à faire de la France une nation de sportifs et de sportives avec un élément majeur : « le sport à l’école ».

Qu’ont fait jusqu’alors les gouvernements et leurs ministères de l’Éducation pour son développement ? Baisse des horaires disciplinaires dans la voie professionnelle qui sera renforcée par l’augmentation des durées de stages, multiplication des cours les mercredis après-midi dans les LGT et LP empêchant le fonctionnement des associations sportives scolaires, baisse de la formation initiale des professeur·es des écoles en EPS et non jugulation de la disparition des CPD, CPC EPS, refus de revoir les programmes rejetés unanimement dans cette instance, refus de revoir les certifications, délitement de l’UNSS avec des orientations budgétaires et sportives contestées et multiplication des charges administratives, suppression de près de 1 000 postes en EPS dans le second degré depuis 2017… et on pourrait allonger la liste à l’infini. Quelle réalité, M. le ministre, derrière votre phrase sibylline lors de la conférence de presse de rentrée « l’EPS à l’honneur » ?

Le « sport à l’école », expression instaurée par Jean-Michel Blanquer en nous expliquant que c’était là le moyen d’être compris par le grand public, ne vise en fait qu’à dénaturer l’EPS et à générer la plus grande confusion pour faire accroire que les dispositifs que l’on met en œuvre toucheraient effectivement les pratiques physiques, sportives et artistiques du service public d’éducation. On en vient maintenant à expliquer, à divers endroits, que bouger équivaut à suivre un enseignement !

Les 30 minutes d’APQ qu’on voudrait faire passer à 1 heure ne sont pas et ne seront jamais équivalentes aux heures d’EPS dans lesquelles on dépasse le simple fait de bouger. Les 2 heures supplémentaires de sport au collège ne sont pas des heures de collège, mais du périscolaire qu’on tente de faire entrer dans les grilles et, qu’alors qu’elles ne fonctionnent pas, qu’elles génèrent des inégalités flagrantes, qu’elles ne touchent pas le public visé, qu’elles entrent en concurrence avec l’EPS, le Sport Scolaire, le sport associatif sur les installations, le Président de la république parle maintenant de généralisation en réinventant les « orphelins de 16h » de Nicolas Sarkozy… Les bilans sur ces 2 heures supplémentaires se font plus qu’attendre et ceux que nous avons par les remontées d’établissements ne sont pas toujours beaux à voir !

Alors que les moyens existent en termes de compétences et de personnels, on cherche en dehors de l’École des pseudo-solutions pour augmenter la pratique des jeunes. On préfère chercher à l’extérieur alors que tous les outils existent. Ce faisant, on induit des formes d’externalisation inacceptables. Le service public d’éducation ne peut être le lieu de politique faisant la part belle aux organismes privés. Comment comprendre que les 2h supplémentaires de sport au collège puissent être ouvertes aux structures des loisirs sportifs marchands qui n’ont pas délégation de service public ? Comment comprendre qu’on puisse rendre l’UGSEL éligible au Pass’Sport quand cette même éligibilité est refusée à l’UNSS et à l’USEP ?

Quel sera donc l’héritage des JOP 2024 en termes de pratique pour les jeunes scolarisé·es ?

A l’heure actuelle, aucun ! Aucune installation utilisable par les scolaires n’est sortie de terre, aucune dynamique lancée pour la valorisation d’une discipline et de ses enseignant·es, aucune prise en compte de la parole des personnels, de leur expertise, de leur demande d’augmentation des horaires disciplinaires seuls à même de toucher l’ensemble des jeunes… demande pourtant fortement relayée par les parlementaires, lors de l’examen du PLF Sport et Jeunesse de 2023 et de la mission d’information sur les retombées des Jeux…

Alors bien sûr les mesures nécessaires, et que tout le monde connait, représentent un coût, mais il s’agit ici d’investissements avec des retombées positives extrêmement importantes, tant en termes de santé publique, de bien-être, que d’acculturation de pratiques sociales.

Pour hériter de quelque chose, il faut que ce quelque chose existe et ce n’est pas d’un champ de ruines dont ont besoin les générations futures. Espérons que votre arrivée puisse changer la donne !

*Conseil Supérieur de l’Éducation

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