Les groupes de niveaux, c’est l’équivalent moderne du bonnet d’âne !

Par Claire Pontais

L’adolescence est un moment de transformations importantes, qu’elles soient corporelles, psychologiques, de notre mode de vie ou de notre rapport au monde. Pour Marie-Rose Moro, psychiatre, cheffe de la maison des adolescent·es à l’hôpital Cochin à Paris, « l’école est fondamentale à l’adolescence parce que c’est une institution structurante. Ce qui est structurant, c’est de pouvoir s’appuyer sur l’institution et les enseignant·es mais aussi le fait de se soutenir entre ados, de pouvoir grandir ensemble, construire des liens sociaux. En ce moment, on constate que tout ce processus de socialisation à l’école est fragilisé (..). Les enfants ont besoin d’un groupe homogène qui les rassemble, pas d’être dans des stratégies de séparation de classement de hiérarchie (…). Le plus important c’est de faire et d’apprendre ensemble ».1

De leur côté, les spécialistes des politiques éducatives et de la ségrégation scolaire disent tous que l’instauration de groupes de niveau constituerait un recul terrible pour les élèves issu·es des classes populaires. Pierre Merle dit ceci : « C’est une pratique très défavorable à la progression des élèves faibles. Les mettre ensemble accroît leurs difficultés : on les prive des « locomotives » que sont les meilleurs élèves. En « étiquetant » certains élèves comme plus faibles, on accroît la conscience qu’ils ont de leurs difficultés. C’est un équivalent moderne du bonnet d’âne (….), alors que l’entrée en 6e doit marquer un palier positif, le passage chez les « grands ».2

La réussite d’un apprentissage dépend plus d’une participation à un collectif de travail

Pour Christophe Roiné3, « on oublie que l’on n’apprend jamais seul, que la réussite d’un apprentissage dépend plus d’une participation à un collectif de travail qu’à une acquisition individuelle de biens scolaires. » « En triant les élèves, en faisant en sorte qu’ils ne rencontrent que leurs semblables (les bons avec les bons, les faibles avec les faibles), on s’empêche de considérer que le collectif

par sa diversité est un vecteur essentiel de la réussite. Bénéficier de l’entraide entre pairs, s’acculturer au métier d’élève, imiter, travailler ensemble, constituer une mémoire commune et s’y référer, voir comment les autres s’y prennent, écouter des registres de langue divers, coopérer… la classe est une communauté d’apprentissage qui bénéficie à chacun. »

La réussite d’un apprentissage dépend plus d’une participation à un collectif de travail qu’à une acquisition individuelle de biens scolaires.

En quoi séparer et mettre à part les bon·nes élèves, les moyen·nes, les faibles fait-il avancer les choses ? En EPS, les programmes stipulent que nous devons porter notre attention sur les élèves en difficulté. Et on leur enverrait le message inverse en maths et en français !? Pas difficile d’imaginer et de comprendre la violence symbolique et réelle que cela représente pour ces élèves ! …Mais bien sûr, ensuite, pour compenser ces inepties, on érigera des lois sur l’autorité et sur l’uniforme ! Il y a de quoi être en colère !

Nous le savons tous et toutes, les élèves ont besoin d’être moins nombreux·euses par classe, ont besoin de professeur·es bien formé·es, d’un climat scolaire qui leur donne envie d’aller à l’école. Tout l’inverse de ce que l’on nous propose ! 

Pour continuer….

France inter, 6 mn : Dépression, suicides, ce qui angoisse la jeunesse

Pierre Merle : Les groupes de niveaux sont l’équivalent du bonnet d’âne

Christophe Roiné Les groupes de besoin, un modèle inopérant qui relève de la pensée magique

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