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Analyse et commentaires du SNEP-FSU sur le rapport fait à Monsieur le ministre de l’EN, à Madame la ministre de l’ESR et Madame la ministre des sports sur « le développement de la pratique sportive étudiante ».
Rappel du contexte :
Ce rapport a été publié fin janvier, réalisé en 2023 par les inspecteur·rices de l’IGESR M. Piozin (pilote), M. Leroy et Mme Sève, à la demande de Madame la ministre des sports et de Madame la ministre de l’ESR.
La lettre de mission de ce rapport n’est pas de même nature que celui de France Universités (FU) et part du constat que depuis plus de 10 ans aucune nouvelle étude exhaustive n’a été menée, depuis le rapport Auneau- Diagana (2008). Trois demandes sont faites dans la lettre de mission :
- Identification de la réalité de la pratique sportive étudiante et de ses formes (au sein de l’université, hors université, …).
- De formuler des recommandations pour densifier et diversifier l’offre sportive vers les étudiant·es.
- Et d’identifier les leviers nécessaires au développement de la pratique sportive étudiante.
Enfin de s’appuyer sur les acteur·rices institutionnel·les concerné·es types C3D, FFSU, GNDS en s’arrêtant aux syndicats étudiants mais pas les syndicats de salarié·es dont le nôtre et le SNESUP-FSU.
Une synthèse intéressante est faite de la page 1 à 3. Elle est suivie d’une liste de 13 préconisations/recommandations (P/R) page 4 et 5 classées en trois types :
- Recommandations relatives à l’amélioration des connaissances en matière de pratique sportive étudiante.
- Recommandations relatives à l’offre sportive.
- Recommandations en matière d’équipements et d‘installations sportives.
Analyses du rapport et nos commentaires
Un rapport de plus pour le « surplace au milieu du gué » ?
Et toujours l’esquive du sous-investissement public nécessaire !
Certes, c’est un rapport qui comporte des points d’appuis, des préconisations/recommandations (P/R) pour améliorer la pratique étudiante au service de leur formation universitaire complète et équilibrée.
A/ Des points d’appuis :
1/ Il pointe d’une part l’insuffisance d’une politique nationale de recueils de données publiques sur la pratique sportive étudiante en général et spécifiquement dans la tranche 15 ans-24 ans. Il fait 3 P/R que nous acquiesçons et auxquelles nous souhaiterions être associé·es dans la construction.
2/ D’autre part et c’est une nouveauté que nous saluons, les IG pointent toute une frange du monde étudiant hors université (près d’un million sur les 3 millions d’étudiant·es) et qui sont pour beaucoup dans des formations d’ESR installées dans les Lycées (CPGE, BTS et STS…) et qui n’ont pratiquement pas d’offre sportive et de moyens. Ce rapport constate (p. 53) le détournement très fréquent de la dotation obligatoire pour 2 heures d’EPS obligatoires pour les CPGE dans les lycées (83 000 étudiant·es). Pourquoi la P/R 11 sur les lycées accueillant des formations d’ESR n’est pas plus directive sur 2 h d’EPS obligatoires avec dotation d’enseignant·es d’EPS titulaires… ?
3/ Ce rapport, contrairement à celui de France Universités (FU), souligne pour les universités que les SUAPS sont les acteurs principaux de l’offre. C’est un chapitre page 23. Il montre par divers exemples leurs politiques riches et variées dont l’offre d’UE (page 21). Il est fait état de la dégradation du taux d’encadrement en termes d’enseignant·es titulaires d’EPS et de l’augmentation des HC (p. 17) en pointant que cela peut « générer des tensions sur les personnels d’encadrement » (p. 17) et devenir une limite à l’offre.
Enfin ce rapport dans sa PR n° 9 (p. 31) écrit : « Systématiser la proposition d’une UE Sport optionnelle dans les maquettes de toutes les formations de premier cycle, en spécifiant les compétences qu’elle permet de développer chez les étudiant·es. ». Nous soulignons dans ce même chapitre (p. 30) qu’il est écrit : « …. Chaque jeune devrait avoir au moins une offre d’APS dans son environnement académique. … avec ECTS… » et « Pour autant la mission ne propose pas la généralisation d’une pratique sportive obligatoire au sein des cursus, estimant que la généralisation d’une offre de pratique sportive à tous les étudiants, pouvant être choisie ou non, constitue une première étape socle avant toute chose … » Pourquoi pas si c’est une 1ère étape ! Mais cette écriture est-elle là pour ménager l’autonomie chère à France Universités ?
«Et toujours pareil », les IG constatent qu’un des principaux obstacles est le manque de temps (p. 16) pour X raisons. Cette UE obligatoire serait logiquement l’élément clef/levier avec bien sûr des postes et des ISU en conséquence ! Fermer le banc.
B/ Les limites du rapport pour nous sont atteintes…
1/ Car pour nombre d’autres R/P cela renvoie aux bonnes volontés locales, donc à l’autonomie des universités (pas moins de 7 P/R) et aux fameux partenariats ou articulations à renforcer, à développer avec d’autres acteurs comme les clubs sportifs et autres acteurs dont CROUS et collectivités. Ces pistes ne sont pas du domaine structurant et dynamisant dans le cadre d’un service public national sur tout le territoire. Elles sont des incantations habituelles et/ou des illusions dans leur faisabilité et pose aussi le souci, non des moindres, de la valeur universitaire des pratiques qui doivent répondre à certains critères et finalités universitaires. Si c’est un club qui encadre sur le campus où est la différence avec la pratique des SUAPS ? La confusion n’apporte souvent que des problèmes.
2/ La question des moyens budgétaires pour mettre en œuvre des pas en avant de ce rapport dont la P/R n°9 n’est jamais explicitée et mise comme élément incontournable. Bref ce sujet majeur de l’investissement public nécessaire en lien avec les besoins et l’objectif poursuivis d’une augmentation de la pratique pour diverses raisons dont la lutte contre la sédentarité est invisibilisée, diluée dans les écritures.
Il est surprenant page 34 que les IG n’aient pas pointé, dans le cadre de leurs investigations pointues parfois, le fait que c’est la même somme de subvention pour charge de service public (SCSP) qui est maintenue dans les PLF depuis 2018 (!), soit 22,1 millions (ms) se répartissant entre vie de campus, SUMPPS et SUAPS. Avec l’inflation additionnée sur ces dernières années et en particulier 2022 et 2023, c’est un recul permanent de moyens publics qui s’amplifie. Idem pour La FFSU qui reste bloquée à 5,3 ms depuis des années. Au total c’est une diminution du pouvoir d’agir pour les SUAPS et FFSU.
On constate le lien entre absence de poursuite de montée en charge de la SCSP, synonyme de financement public du budget de l’ESR depuis 2018 et la substitution en faisant payer les étudiant·es par l’instauration de la CVEC en 2019, nouvel impôt (taxe dixit le PLF) de 95 euros payés (R.2022) par les étudiant·es non-boursier·ères. De plus, les IG pointent bien que la SCSP a vocation à financer toutes les dépenses liées à la pratique sportive quand cette dernière est intégrée dans le cursus. Mais alors si on veut développer la P/R n°9 de la généralisation d’UE (facultative) il faut bien augmenter la SCSP ! Quid ?
Rappel : nous portons la proposition d’urgence de la création/dotation d’au moins 100 postes d’enseignant·es d’EPS (fonctionnaires) dont au moins un pour les 73 SUAPS et GE en souffrance. Cet apport dès la rentrée 2023 ou R 2024, apporterait automatiquement un mieux au niveau des services et surtout de l’offre encadrement pour les étudiant·es. Ce recrutement, toutes cotisations comprises, serait un investissement autour de 7 millions d’euros au budget du MESR (estimation 70 000 euros par poste par an).
Ainsi, cette CVEC reste toujours une diversion masquant le non-investissement public sur les sujets du sport, de la santé, de la culture et des initiatives FSDIE.
De plus, le rapport dans ce chapitre pointe le fait, à la demande de certain·es acteur·rices (et que nous partageons malgré notre opposition au principe politique de cet impôt) que l’on pourrait flécher comme pour la santé (15 % de la Cvec) et des initiatives étudiantes (30 %) un fléchage pour le sport. Mais dans la même phrase (p. 34) les IG disent que ce serait « en rupture avec le principe d’autonomie accordé aux établissements pour la gestion de celle-ci. ». Mais pourquoi est acté par décret, le fléchage pour la santé par exemple qui est bien une rupture avec l’autonomie ? On ne comprend pas ce jugement différencié. Pour le SNEP-FSU, une fourchette avec un plancher à 15 % serait légitime (comme la santé).
Certes on ne peut que cautionner comme dans le rapport FU la P/R n°14 : « au sein des établissements d’ESR, veiller à ce que la possibilité de pratiquer du sport se fasse à un cout nul ou réduit pour les étudiants. »
Les ISU. De même, les P/R n° 12 et 13 sur les installations sportives ne sont pas inintéressantes voire utiles mais pas déterminantes face à la nécessité d’un plan public de type « Marshall ». Là aussi nous renvoyons à notre manifeste (cliquer ici)
3/ Les motivations des étudiant·es sont bien étudiées (page 17 à 21) et nous en partageons le constat… (bien-être…, compétition peu évoquée, …). La P/R n°10 sur « la programmation annuelle d’événements censés répondre aux attentes multiples des étudiant·es… » est souvent mise en œuvre par les SUAPS et fait partie de l’animation de la vie de campus, qui est une des 8 missions de ceux-ci. La question est comment à la fois répondre aux attentes multiples y compris celles minoritaires (dont la compétition) sans non plus être piloté·e par ces attentes, qui suivent aussi des modes ou des représentations. Tout en en sachant que chaque SUAPS essaie à juste titre déjà d’articuler et d’équilibrer les « besoins » ou demandes des étudiants avec l’enjeu de formation dont de réflexivité sur les « modes » d’APSA.
Ce qui nous renvoie aussi dans le cadre d’une formation universitaire à une explicitation des « savoirs cachés (académiques) portés par l’agir » dans la pratique des APSA. Soit une formation universitaire par et dans les APSA qui vont aussi au-delà des dites compétences transversales de types psycho-social ou d’habitus santé et de lien social.
Pour conclure
Ce rapport comme d’autres, esquive ou effleure implicitement la responsabilité première d’une politique nationale de l’ESR avec des moyens budgétaires, dont humains, en termes de création de postes titulaires EPS. Ce serait le levier le plus dynamisant/structurant pour développer la pratique sportive de tous·tes les étudiant·es, au service de leur formation universitaire (pratique critique/réflexive sur les APSA et apports de compétences) et simultanément à la construction d’un habitus santé (physique, psychique et social) synonyme d’équilibre et de facilitation de réussite dans leurs études.
Nous rappelons que ce sous-investissement public sur ce sujet, et bien d’autres, représente finalement, un coût pour la société. Le rapport Auneau-Diagana avec ses 7 propositions, dont l’UE obligatoire, reste toujours pertinent et concret et, depuis ces années, qu’a-t-il été réalisé, à part d’autres et, encore d’autres rapports… ? Le diagnostic est connu. Passons aux actes, véritablement.